• Traumatisme psychique

    Dépistage – traitement


                 Je fais parti de la CUMP de la Somme (cellule d’urgence médico-psychologique), nous intervenons sur site et en différé lors de catastrophes ou d’accidents à fort retentissement collectif. De part cette activité, je suis amené à suivre des patients ayant vécu des traumatismes psychiques.

     

                Comment reconnaît-on un traumatisme ?

                L’état de stress post traumatique (ESPT) est le diagnostique du traumatisme psychique issu de la classification américaine du DSM IV (PTSD : Post Traumatic Stress Disorder en anglais). Cette classification est très connue bien que comportant quelques lacunes. Quand un traumatisme fait irruption la personne n’est pas confrontée à un stress mais à un effroi. Cet effroi amène une rupture dans le sentiment continue d’existence, et peut amener une désorganisation de la vie quotidienne allant jusqu’à une modification de la personnalité de la victime traumatisée. Le syndrome post traumatique peut apparaître avec un délai de quelques semaines à quelques mois, voir parfois quelques années à distance de l’événement traumatisant.

                Nous pouvons résumer les symptômes en trois catégories :

                1- Les symptômes intrusifs.

                On y retrouve les reviviscences, les victimes revivent le traumatisme au travers de cauchemars, des flashback (images s’imposant à la conscience durant les phases d’éveil). Certains sons, certaines images peuvent réenclencher le vécu du traumatisme comme cet ancien casque bleu qui se jette ventre au sol dès qu’il entend un pot d’échappement claquer pensant que c’est une bombe…

                2- Les symptômes d’évitement

                Les victimes mettent souvent en place des stratégies pour faire face à leurs angoisses, ils évitent par exemple les lieux où ils savent que leur traumatisme pourra faire irruption, ils peuvent aussi éviter de regarder les informations à la TV, etc. Même si cela peut fonctionner durant un temps, les conséquences à moyen et long terme sont un repli au domicile, et une inhibition majeure.

                 3- Les symptômes d’hyperactivité neurovégétatifs

                Très fréquents lors d’agressions, les victimes sont en hyper vigilance, attentifs au moindre bruit, sur le « qui-vive » ! Cet état amène très rapidement un épuisement psychique.

     

                Associé à ces trois catégories d’autres troubles peuvent ensuite se rajouter :

    -Trouble du sommeil (lié souvent aux cauchemars)

    - Trouble de l’appétit

    - Déréalisation

    - Dépression

    - Remaniement de la personnalité

    -  Repli et inhibition

     

                Traiter un traumatisme psychique

                On ne peut pas effacer le souvenir du traumatisme mais on peut traiter ses symptômes ! Ceci est très important car bien souvent les patients pensent que leur état n’est pas soignable et une résignation s’installe. Tous les symptômes décrits plus haut sont un véritable handicap pour la personne qui les subit, ils attestent que le trauma est encore présent ici est maintenant, qu’il n’est pas digéré.

                 Les thérapies

               Il existe plusieurs thérapies efficaces dans ce domaine. Les trois principales sont les thérapies cognitives et comportementales orientées sur le traumatisme (TCC trauma), les thérapies psycho-dynamiques et l’EMDR. Les TCC trauma et l’EMDR sont toutes deux recommandées par la haute autorité de santé (HAS).

                 Précisions sur l’EMDR

                Je pratique l’EMDR c’est donc sur ce point que je vais plus parler.

                Selon David Servan-Schreiber, l’EMDR pourrait se définir comme une « désensibilisation et un retraitement par les mouvements oculaires ». En effet pendant les rêves, nous bougeons les yeux rapidement, le cerveau digère alors ce qui s’est passé pendant la journée et dans le passé, un travail de connexion s’établit pendant la nuit, nous permettant de relativiser. Or, après un traumatisme, le travail de connexion ne se fait plus, l’EMDR permet  donc de procéder à  l’aboutissement du travail d’archivage.

             « Le traitement par les mouvements oculaires pendant la séance d’EMDR, facilite la formation de nouvelles connexions entre les souvenirs du traumatisme. Un réseau se formerait, chaque souvenir paraissant se relier à un autre puis à un autre puis à un autre… Les souvenirs traumatiques, presque pris de vitesse, semblent alors remonter d’une connexion à une autre jusqu’au cortex préfrontal. Là il se connecte instantanément à notre connaissance de la vie, à notre expérience. Cette activité fait que notre cortex se rallume, les souvenirs traumatiques basculent dans l’univers de la raison et sont alors archivés dans le passé, l’amygdale s’éteint et le traumatisme est digéré » 

    Depuis 2004, l’EMDR est reconnu par l’INSERM comme une méthode efficace et rapide pour agir sur le syndrome du stress post-traumatique, qui était l’une des pathologies les plus difficiles à soigner. Malgré le manque de compréhension et de précision des mécanismes d’actions de cette méthode, 18 études ont démontré que  80% des consultants n’avaient plus de symptômes après 3 séances.

     

                Le traumatisme « T »  les traumatismes « t »

                Une dernière précision me semble importante à faire. La thérapie EMDR a été pratiqué avec les vétérans du Vietnam, nous sommes dans le cas de traumatisme avec un grand « T ». Les traumatismes psychiques peuvent prendre une forme différente mais tout aussi perturbante : se sont les traumatismes avec un petit « t », c’est-à-dire une succession d’événements sur le même thème dont la fréquence forme un traumatisme à part entière ! Par exemple une femme qui dans son enfance a vécu de nombreuses situations où sa mère l’a délaissée, rejetée, négligée. Ces situations répétées d’abandons ont amenées chez elle de véritables angoisses abandonniques qui sont un traumatisme à part entière et la perturbent encore aujourd’hui. La thérapie EMDR a de très bons résultats aussi pour ce type de traumatisme.
    Toute expérience humaine passée amenant une cognition négative sur soi ("je suis nul", "je ne mérite pas de ...", "je suis en danger") et qui résonne encore comme vrai ici et maintenant peut être traité par la thérapie EMDR. 


     


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  • Affirmation de soi et dépression

     

                Nous sommes l’image que les autres nous renvoient, ou tout du moins ce qu’on en interprète. Le mythe de Narcisse est très connu désormais mais est, par certains, vue de façon péjorative. Il est pourtant nécessaire d’être un minimum « narcissique », égocentré, c'est-à-dire avoir son égo centré sur soi : l’investissement excessif dans l’aide aux autres, pour s’oublier soi-même n’est qu’une fuite, et tôt au tard la dépression nous guète. Les thérapies mettent souvent l’accent sur l’utilité d’un renforcement narcissique. Un syndrome dépressif est souvent associé à une mauvaise estime de soi, une dévalorisation voir une culpabilité d’être déprimé.

    Le burn out: épuisement profesionnel

                La dépression en lien avec un trouble de l’affirmation de soi

                 Dans une société de production et de productivité une personne dite « dépressive » est stigmatisée comme étant « inapte » au travail… inaptitude qu’un arrêt de travail vient sanctionner. Et quand l’état dépressif devient si sévère qu’une hospitalisation devient nécessaire, la personne a souvent un vécu de honte, pensant que désormais elle est étiquetée « psy ».

        J’aimerai illustrer mon propos d’un exemple :

                    Sylvie se dit « déprimée ». Rien ne parait plus raisonnable, tant aux parents qu’aux amis de Sylvie, que de lui « remonter » le moral. Or, il est fort vraissemblable qu’elle ne s’en sentira pas mieux, mais au contraire, s’enfoncera un peu plus dans sa tristesse. Voyant cela, les autres redoubleront d’efforts pour lui faire voir le bon côté des choses. Guidés par la « raison » et le « bon sens », ils ne peuvent pas se rendre compte (et Sylvie ne peut pas le dire) que leur aide, au fond, consiste à exiger qu’elle ait certains sentiments (de joie, d’optimisme, etc.) mais pas d’autres (de tristesse, de pessimisme, etc.). Il en résulte qu’au lieu de connaître un épisode, qui à l’origine aurait pu n’être qu’un accès passager de tristesse, Sylvie est maintenant envahi de sentiments d’échec, de dévalorisation et d’ingratitude envers ceux qui l’aiment tant, et font tout cela pour l’aider.

                  Comment sortir de cette auto-culpabilité ? Comment s’accorder le droit d’être triste ? Comment renforcer une estime de soi qui était déjà bancale ? Evidemment les thérapies ont leur rôle à jouer dans les réponses à ces questions, mais la première étape est de reconnaître qu’on a le droit de se sentir mal, qu’il est parfois légitime de pleurer et que, comme me le disait une patiente : « Pour bien vivre les moments de bonheur, il faut bien vivre les moments de malheur ! ». L’enjeu, ici, est l’affirmation de soi.

     

     

                Le trouble de l’affirmation de soi

                 Jean a d’excellents résultats professionnels, son patron lui a demandé de présenter un projet à l’ensemble de l’équipe : il n’en dort plus la nuit. Toute sa vie, Jean s’est efforcé d’éviter de prendre la parole en public. Même s’il sait qu’il connaît bien le projet qu’il doit présenter, il se sent incapable de faire cette présentation orale. En désespoir de cause il demande un arrêt de travail à son médecin traitant pour éviter cette situation qui le panique.

                 Le manque d’affirmation de soi peut prendre de multiples formes. Certaines personnes sont trop passives, d’autres trop agressives, d’autres encore alternent les moments de passivité et d’agressivité, parfois en se « trompant de colère ». A plus ou moins long terme, si elles ne réagissent pas, toutes ces personnes connaîtront, en plus de leurs difficultés relationnelles, des problèmes plus ou moins grave liés à leur trouble de l’affirmation de soi : dévalorisation personnelle, anxiété généralisée et diffuse, sentiment de honte aigu, repli sociale, voire dépression.

                Lorsqu’il est très important ce trouble de l’affirmation de soi prend la forme d’un évitement généralisée des situations sociales : c’est la phobie sociale. La peur des autres est alors si viscérale qu’on évite le plus possible les contacts avec autrui par peur d’être mal jugé.

                 Si dans ces quelques lignes vous vous êtes reconnus, n’hésitez pas à consulter… le simple fait de réagir et de prendre la décision de consulter est déjà une manière de s’affirmer. 


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