• Céline est une collègue psychologue.

    Elle a subis un traumatisme vicariant. C'est le traumatisme que subissent les soignants quand ils sont trop impactés par leurs patients. C'est une souffrance mal connue du monde médical et surtout souvent mal dépistée. Le traitement en est pourtant relativement simple en thérapie EMDR. Ce qui est important c'est que n'importe qui peut subir un traumatisme vicariant et que personne n'y est immunisé. Ce n'est ni un signe de faiblesse ni un signe d'une mauvaise hygiène de vie. Ça arrive, c'est tout. Mais des solutions sont possibles. 

    Le traitement du traumatisme vicariant de Céline s'est déroulé sur 2 séances de retraitement EMDR. 

    Je la remercie énormément pour son témoignage, il pourra aider de nombreux collègues thérapeutes à prendre soin d'eux. Voici son témoignage: 

     

    Trauma Vicariant

     Juillet 2017

     Depuis quelques années, ma charge de travail est importante et je suis confrontée à des personnes présentant des problématiques émotionnelles parfois difficiles comme tout professionnel de santé.

    Pour autant, j’ai mis en place des plages de temps pour me ressourcer de manière quotidienne, avec la pratique de sport en extérieur, proche de la nature et aussi en intérieur.

    J’ai une énergie importante et arrive à mettre de la distance, avec les traumas dont les patients se libèrent peu à peu.

    Certains cas, peu fréquents me trottent parfois dans la tête mais je les adresse alors en supervision ou en covision ou avec des collègues psy ou  avec des médecins ou autres professionnels de santé. Je ne me sens pas isolée, j’ai créé autour de moi des espaces d’écoute et d’échanges.

    En début d’année 2017, je ressens le besoin  de m’ancrer encore plus, je pratique déjà  la méditation Pleine Conscience, et je commence des méditations Heartfulness, dans un centre toulousain. Je vis mon métier avec bonheur et satisfaction. J’envisage de continuer à me former au fil des ans.

    Lors d’une séance de méditation, une douleur au cœur apparait avec quelques flashs d’images de mon passé mais je parviens à me recentrer et trouve du plaisir à ses rencontres avec moi-même.

     En juin 2017, je reçois une patiente qui est envahie par des angoisses débordantes de mort suite au décès de sa tante qui s’est jetée dans une rivière un an avant. Je traite ce trauma en EMDR avec l’identification de la pire image et la patiente peu à peu ressent du mieux être, comme une prise de distance par rapport à la scène.

     Et, tout à coup, sans signe avant coureur, en pleine nuit, je suis réveillée par des angoisses de mort, impérieuses qui m’envahissent. Je ressens l’urgence de me faire hospitaliser, pour me protéger de moi, je me sens en danger, ces idées de mort sont omniprésentes et des scénarios de passage à l’acte s’imposent à moi, principalement par noyade ou pendaison.

    Je me rapproche de mon médecin, commence un traitement antidépresseur et anxiolytique,

    Je commence quelques séances de thérapie classique, puis en EMDR avec un thérapeute puis un autre, ce qui ne donne pas d’amélioration,

    Le diagnostic posé par les différents interlocuteurs du secteur médical est plutôt le burn out et un deuil auquel j’ai été confronté 4 ans auparavant non travaillé et peut être aussi le départ d’un de mes enfants.

    Tout ceci est là en même temps, je vis un enfer, au quotidien, je suis une vraie loque, je ne me reconnais plus, moi, si dynamique, je suis sans énergie, comme si un court circuit avait éteint mes capacités physiques et intellectuelles. Je ne vois pas d’autres solutions que de mourir.

    Je pars en vacances, forcé par mon conjoint, je suis un robot, un zombie, je n’ai plus accès à mes ressources, à mes pensées rationnelles, à mes activités physiques qui me font d’habitude tant de bien, je n’aspire qu’à mourir. Je ressens de la honte d’être dans cet état par rapport à ma famille proche, comme si je n’avais pas su me protéger.

    Tout est mélangé, dans ma tête, mes patients, le deuil d’il y a 4 ans, le départ d’un de mes enfants. Je cherche des documentations là-dessus, je trouve celle du trauma vicariant, je ne comprends pas toutefois comment m’en sortir, je remplis le protocole approprié mais cela ne change rien.

    Ma collègue médecin me conseille de continuer mon activité, dès mon retour de vacances,  elle me fait des séances d’ostéopathie, et travaille sur mon cœur, ce cœur qui saigne comme si un couteau était planté dedans depuis cette fameuse nuit de juillet 2017. Elle prend rdv pour moi avec un psychiatre fin aout et me donne des coordonnées pour me faire suivre en EMDR. Je ne veux pas aller voir le psychiatre, je ne veux pas… j’y vais quand même…

    Fin aout la psychiatre parle de burn out et souhaite que j’arrête mon activité et prenne du repos ou me fasse hospitaliser pour me mettre à l’abri. Elle me dit que cela va prendre du temps.

    Ma collègue médecin, quant à elle, n’est pas d’accord, elle me propose de continuer mon activité de manière plus légère et n’arrête pas de me dire que cela va passer mais qu’il faut que je travaille la fracture qui s’est ouverte.

    Je parviens à continuer mon activité, j’allège mes journées, prends des pauses, écoute des petites méditations, c’est difficile mais au fil des jours, cela va de mieux en mieux.

    Je n’arrive pas à me résoudre à prendre rdv en EMDR avec un thérapeute. J’ai déjà essayé , j’en ai vu 2 et cela n’a rien donné. De plus, J’ai peur de travailler sur les images intrusives. J’ai peur que cela « flambe « de nouveau.

    Cette collègue médecin m’encourage et me dit qu’il faut le faire. 

    Quand j’ai le rdv avec le thérapeute, je ne veux pas y aller,

    Il m’explique que ce n’est pas un burn out, du fait que ce trauma a explosé littéralement du jour au lendemain. Il met des mots sur ce que je vis. Il me dit que le plus dur est passé, que cela ne va pas être autant de mois de convalescence, qu’il a déjà vécu cela, que j’ai mis des choses en place pour me protéger mais que cela peut arriver.

    La 1ere séance, il me demande de proposer une marche à suivre, j’en suis incapable, tout se mélange dans ma tête, j’ai bien ma feuille avec le protocole mais pas d’idée pour enchainer et je suis obligée de le suivre dans ces propositions.

    nous ciblons l’image, et cela s’estompe peu à peu, mon cœur me fait toujours mal.

    Je sors malgré tout de cette séance rassurée et confiante.

    La 2nde séance après réévaluation de la scène initiale de la séance précédente, nous passons au protocole du futur,

    Je n’ai pas d’inquiétude sur une scène en particulier, comme un suicide ou autre mais mon inquiétude porte plutôt sur un patient qui présenterait une situation qui me ferait à nouveau perdre pieds, sans savoir précisément aujourd’hui ce que cela pourrait être. Nous le traitons et à nouveau je garde toujours mal au cœur à la fin de la séance.

     

    En conclusion,

    La psychiatre est très surprise de la rapidité de mon mieux être. En effet mi septembre je suis en possession de mes moyens, « comme avant ».

    Aucun thérapeute sur mon chemin ne m’a aidé à comprendre ce type de trauma à part le dernier. Cela m’a énormément soulagé de comprendre ce qui m’était arrivé et de comprendre aussi que cela pourrait se reproduire mais que j’allais mettre en place encore d’autres moyens de me protéger et de m’ancrer, style Yoga, Ch Gong et que la prochaine fois, je saurais qui aller voir.

     

    Je dois continuer à faire attention à moi, je suis encore en convalescence, je dois me mettre des limites et « écouter mon cœur, mon corps »

     


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